
La mare des quatre saisons
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Les eaux noires absorbent la faible lumière émanant d’un ciel gris et bas. Et pourtant, sur le fond, un frémissement. Les poissons endormis si peu de temps auparavant agitent faiblement leur queue. et redressent doucement la tête : “Est-ce le moment ? Remonterons-nous à la surface ? – Non c’est trop tôt. L’eau est froide encore et les nuits sont gelées. Rendormons-nous.”
Et sur le bord, au ras de terre, trois petits bonnets blancs pointent leur clochette. Les perce-neige sont là ! L’hiver n’en a plus pour longtemps. “Encore quelques efforts et nous l’aurons défait !” De toutes parts, crocus et narcisses , tulipes et primevères lancent leur notes éclatantes dans le concert du printemps. .
Partout tout lève, tout verdit. Les iris développent leurs feuilles vert glauque et s’épanouissent leurs fleurs rose tendre et jaune éclatant. Les prêles reverdissent et tendent leurs tiges vers le ciel. L’astilbe développe ses crosses et attend son heure pour ses plumeaux délicats. De grandes flaques de ciel bleu déversent leur lumière sur l’herbe qui reverdit et croît. Il y a cette douceur dans l’air…
Les petits mandarins se poursuivent sur la mare et soudain, tout ébahis de leur tendresse soudaine, se caressent du bec et s’aiment dans de doux clapotis. Il n’y a plus à attendre longtemps pour qu’éclosent les canetons joyeux et dégourdis. Hourrah ! les poissons sont remontés à la surface. Les eaux tièdes frémissent de leurs gracieuses évolutions. Le printemps est là. !
Passent les jours, passent les semaines. Les cannas développent leurs grandes hampes et leurs fleurs exotiques.. D’autres iris se développent et fleurissent. Les libellules viennent se poser sur les prêles à présent hautes et d’un beau vert. Les canards aiment à s’y protéger du soleil après avoir perdu leur livrée d’amoureux. Les genêts épanouissent leur floraison pourpre.. Et la surface de la mare est couverte de larges feuilles vertes où fleurissent bien vite les joyaux lumineux des nénuphars. Des grenouilles s’y amusent et essaient d’attraper les charmantes libellules. Le soleil darde ses rayons mais il fait si bon au bord de l’eau, dans le somptueux été.
Le soleil commence à descendre vers le sud pour se coucher. Les soirées sont plus fraîches. La vigne plantée sur le talus de la mare offre ses raisins juteux et sucrés. Les petits mandarins retrouvent leur beau plumage. Les journées sont encore belles et l’herbe verte fait illusion. Mais quelques feuilles du grand chêne viennent se poser sur la surface de l’eau, qui frissonne à l’idée de ce qui l’attend. Les poissons rouges s’engourdissent et descendent vers le fond peu à peu. Bientôt, ils seront profondément endormis. L’automne flamboyant laisse la place à l’automne brumeux.
Il fait froid et le givre fige les tiges des prêles. Depuis longtemps grenouilles et libellules ont gagné leurs abris. Un peu de glace s’est accrochée aux bords. Les petits canards gardent leur optimisme et leur joie de vivre : ils jouent à se poursuivre dans l’air froid immobile.. C’est l’hiver. Les jours se succèdent où seuls les oiseaux mettent un peu de vie. Les eaux noires absorbent la faible lumière émanant d’un ciel gris et bas. Et pourtant, sur le fond, un frémissement…
Cet article participe à la Cavalcade des blogs créée par le blog « Cheval facile » et organisée ce mois-ci par le blog « Cavalière de montagne ».
Vous trouverez tous les renseignements sur cette mouture de la cavalcade de décembre 2018 sur cette page de « Cavalière de montagne ».
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